Petite balade en « Caravelle », (petit voilier dériveur) sur le lagon.
Le club nautique de Moruroa en 1964/1965 c’était 3 caravelles, puis 2, puis 1.. La base nautique appartenait à la marine qui concédait 25% aux autres demandeurs, peu nombreux.
Dans notre chambrée le copain André SABOT dit « Bébert » à 15 jours de la quille s’est mis en tête de faire du voilier et comme il fallait l’équivalent de sous off pour accéder au club il m’a travaillé au corps pour obtenir gain de cause.
Le sapeur de 2ème classe, De La Roseraie, excellent navigateur et responsable du club après quelques tractations et affirmations mensongères de notre part, a accepté de nous confier le dernier voilier en état… Il nous a donné la voilure et nous a recommandé d’être de retour 30 minutes plus tard et il est reparti à sa piaule…Heureusement car s’il nous avait vu nous débattre pour monter les voiles, il ne nous aurait pas laisser partir. Nous étions 5 équipiers, 2 gros et 3 normaux, les gros c’était pour faire contre poids, 2 ne savaient pas nager dont un gros picard de + de 100Kg…
Mais on a réussi à partir, allure pépère dans le chenal (500mt) et à la sortie gros coup de vent de par-dessus les cocotiers, petit cafouillage, on s'en sort bien et nous v’là parti à fond la caisse sur le lagon qui n’était plus aussi calme qu’au départ. On arrive du coté de « THERESE » et là virement de bord, une scène digne de Laurel et Hardy, mais on s’en sort et nous v’là parti vers le port, on racle un peu une grosse patate invisible et on fonce vers le Francis Garnier, virement de bord impeccable à proximité du bateau et on repart à fond on racle une grosse patate et nous v’là de nouveau à THERESE. C’était bien beau cette course mais fallait rentrer. Ya ka louvoyer .OK on y va. On racle une grosse patate et on arrive ……au Francis Garnier. On repart on racle une grosse patate et on arrive à ….THERESE..
Là ça n’allait plus, je nous voyais déjà remorquer le voilier depuis la cote, pas question de remonter le vent aux avirons déjà qu’on était pas doué..
Mais qu’est-ce qui nous empêchait de remonter au vent ? On a fini par trouver , pour louvoyer on travaille à la barre et à la voile, on se relayait au foc qui est une petite voile alors que le gars qui était à la grand voile y tenait le coup sans problème ? Bien sur dès qu’on avait viré de bord il bordait la voile et……faisait une clé sur un taquet et il se tenait au brin mort. Donc tout le travail se faisait à la barre à laquelle se trouvait Bébert. A noter quand même que le gars à la grand voile avait clamé haut et fort avec Bébert qu’il savait naviguer..
Une fois le problème réglé en quelques zig zag on est rentré comme des chefs..
Nous étions attendus……. Car nous avions largement dépassé le temps imparti, on a expliqué qu’on n’arrivait pas à rentrer et on a fait profil bas car on avait retardé un 2 barrettes de la marine qui a rapidement sauté dans le voilier et hop dans le chenal et au bout du chenal gros coup de vent et le lieutenant qui dessale….Sur le coup on a pas oser rire pour rester correct envers le responsable de la base qui ne faisait que secouer la tête en nous regardant..
Pour montrer notre inconscience, y avait pas de gilet de sauvetage, il n’y avait aucun bateau pour nous secourir à part peut-être le remorqueur Okoumé s’il était opérationnel, et emmener 2 mecs qui savaient pas nager, bon, la caravelle est insubmersible mais on a pas vérifié.
Pendant toute la balade le Bébert se fichait de moi, il rigolait et disait aux autres « regardez ! le Giot il est vert oh ! quelles belles couleurs ». Comme cela s’est bien terminé, je peut dire, quelle belle et surtout inoubliable aventure.
Petit appendice concernant la base nautique en 1964.
La base nautique de Moruroa a vu le jour après l'inauguration de la piste aérienne ...Elle appartenait à la marine qui concédait 25% du temps potentiel aux autres armes.
L'usage des, puis très rapidement de la seule caravelle était donc réservé en priorité aux sous officiers et officiers mariniers qui étaient pratiquement les seuls demandeurs..
Le responsable de ce matériel était un sapeur du Génie Air qui avait une renommée interarmes. d'après moi non usurpée. Un simple 2ème classe sursitaire pas trop militariste, pas feignant et bon pédagogue..
Un peu pompeux le titre de club nautique sans bar et avec une seule caravelle, je sais pas si on nous aurait pris au sérieux. Alors un p'tit bout de plage pour la coque et un caisson pour l'accastillage et la voilerie, ça suffisait, je dis la coque, mais les 2 épaves étaient là aussi pour être cannibalisées et aussi pour rappeler ce qui pouvait arriver.. Là y manquait un mec comme le Gégé avec ses résines et ses fibres de verre pour retaper le matos, mais c'était une autre époque....